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Lobita
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11 janvier 2006

le prince de la mélancolie

orlea_carnet1 Il y a quelques jours - grâce à   Fuligineuse - j'ai découvert un article magnifique sur le site de   lunettes rouges . L'article parle de l'exposition "Mélancolie", et il m'a séduite au point de m'inspirer. J'ai donc décidé de consacrer un billet (que j'aimerais doux) au thème de la mélancolie et à celui que je considère comme son prince.

  6orlea Je parle de cet homme. Si vous ne le reconnaissez pas, cliquez sur ce petit portrait. Pour quelques informations de plus ou autrement racontées, cliquez   ici . Vous vous dites peut-être qu'une italo-américaine transplantée en Suisse n'est pas la mieux placée pour lire un ancien poète français. Sachez alors que j'ai découvert Charles d'Orleans par le chant (un jour avec un petit ensemble vocal français, j'ai chanté son poème "En la forest de longue attente" sous forme de canon). Son ancienne et belle langue, riche en voyelles sonores et compliquée, est probablement plus compréhensible pour une latine que pour un vrai Français moderne. 1orleans Dites-vous bien que (comme toujours) dans ma tête les mots ne restent mots qu'un instant, et qu'ils se défont aussitôt pour tisser des images. Tristesse des belles images aux teintes nacrées, couleurs de vieil ivoire et roses fanées des tapisseries anciennes. Ce que je trouve si grand dans la poésie de Charles: l'élégance gracieuse du désespoir. 4orleans Un mot revient fréquemment dans les textes qui commentent cette poésie: le mot est nonchaloir. J'adore suivre le trajet des mots à travers les époques. Aujourd'hui nous employons le mot "nonchalance" pour désigner une attitude légère, insouciante. Or il me semble que notre "nonchalance" est au "nonchaloir" de Charles ce que la "gêne" est à son ancêtre la "Gehenne" (le feu de l'enfer). Je veux dire que l'ancien mot est tellement plus fort et plus profond. Indifférence, renoncement, abandon de tout et même de soi. Contempler, observer, réfléchir au sens propre du mot: tel un miroir, renvoyer le reflet. 5orleans_copie Plus j'observe cet homme qui est comme un grand oeil sans mains, cet homme reduit au regard et privé d'action, plus je trouve qu'il ressemble à l'homme contemporain: au physicien conscient que les resultats de ses recherches seront utilisés pour détruire, à l'artiste qui manipule cent fois la réalité sans pouvoir y changer un iota.

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Commentaires
F
Je ferai un vers de pur rien ! mais c'est Flaubert avant Flaubert !<br /> Autrement je comprends mieux, maintenant... tu m'éclaires sur le nonchaloir... et sur Charles d'Orléans, que je prenais un peu trop à la légère.
L
Mais que c'est beau tout ça! Tu as la palme de tous les amateurs de poésie du site, car tu m'as fait découvrir quelque chose que je ne connaissais pas. Je me mettrai en quête d'un recueil de Guillame...
G
J'ai pris un peu de retard pour réagir a ta note car j'ai mis un peu de temps à mettre la main sur ceci, que j'adore !<br /> <br /> Je ferai un vers de pur rien<br /> <br /> Je ferai un vers de pur rien<br /> Il ne sera ni de moi ni d’autres gens<br /> Il ne sera ni d’amour ni de jeunesse<br /> Ni de rien d’autre<br /> Sinon qu’il fut composé en dormant<br /> Sur un cheval<br /> <br /> Je ne sais quelle heure je suis né<br /> Je ne suis ni joyeux ni triste<br /> Je ne suis ni sauvage ni familier<br /> Et je ne sais être autrement<br /> Je fus doué la nuit par une fée<br /> Sur un mont haut<br /> <br /> Je ne sais quand je fus endormi<br /> Quand je veille si on ne me le dit<br /> A peu ne m’est le cœur parti<br /> D’un deuil de cœur<br /> Et j’en ai moins souci que de fourmi<br /> Par Saint Martial<br /> <br /> Je suis malade et je crois mourir<br /> Je n’es sais que ce que j’entends dire<br /> Je cherche un médecin à ma fantaisie<br /> Je ne sais lequel<br /> Il sera bon s’il me guérit<br /> Sinon mauvais<br /> <br /> J’ai une amie je ne sais qui<br /> Car je ne l’ai jamais vue<br /> Elle n’a rien qui me plaise ou pèse<br /> Et ça m’est égal<br /> Je n’ai ni Normand ni Français<br /> En ma maison<br /> <br /> Je ne l’ai vue et je l’aime fort<br /> Je n’ai rien eu d’elle et elle ne m’a fait aucun tort<br /> Si je la vois pas je me trouve bien<br /> Tout ça ne vaut pas un coq<br /> J’en connais plus noble et plus belle<br /> Et qui vaut plus<br /> <br /> Je ne sais le lieu où elle vit<br /> Si c’est en montagne ou en plaine<br /> Je n’ose dire combien elle me blesse<br /> Et je m’en tais<br /> Je m’attriste qu’elle reste ici<br /> Quand je m’en vais<br /> <br /> Le vers est fait je ne sais de qui<br /> Et je le transmettrai à celui<br /> Qui le transmettra par un autre<br /> A Poitiers<br /> Pour qu’il me transmette de son étui<br /> La contre-clé<br /> <br /> Guillaume d’Aquitaine
L
Meric Dim pour ta chaleureuse (bien que virtuelle) présence; ça fait du bien de lire tes commentaires! A une prochaine fois sur ton blog lorsque (j'espère bientôt)tu écriras encore...
D
Une fois encore, Chère Lobita, tu nous fais voyager, à travers Temps et Espace. Et tes mots n'ont vraiment rien à envier aux meilleurs auteurs de la langue de Molière. Mais tu ne te contentes pas de bien écrire. Tu le fais aussi avec coeur et passion et tu nous fais découvrir des choses que nous ne savions peut-être pas.<br /> Et plus encore que jamais, je suis tombé sous le charme de tes couleurs. Tu as le verbe, mais tu as aussi le regard !<br /> J'ai trouvé ici l'espace d'un moment une histoire comme on devait les aimer autrefois, au coin de l'âtre...Un "vrai" billet doux ! Donc ce soir, point trop de mélancolie. Juste le désir d'encore lire et relire ces mots. Merci
Lobita
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