Fragments de paradis cachés
...près de chez moi, heureux et ignorés.
Amusez-vous bien à cliquer sur les mots en couleurs, vous vous sentirez voyager. Dans les airs.
De Morges, petite ville silencieuse au bord du Léman, une promenade longe le lac. Une péninsule sablonneuse et un îlôt enferment un plan d'eau peu profonde. Pendant que les grosses carpes sautent en proie à leur folie amoureuse, des fuligules, des nettes rousses, des harles et des colverts se reposent au soleil. Plus loin, voici une file silencieuse de hérons cendrés. Deux tadornes de Belon se pavanent dans leur magnifique livrée blanc-brun-vert, fiers des grosses excroissances sur leur becs cramoisis. Un couple de canards souchet, au bec en forme de spatule, fait sa toilette matinale près d'un vieux tronc. Très loin, trois grèbes à cou noir exhibent leurs huppes. Tout à coup, une avocette élégante (oiseau rare et qui porte bien son nom) tournoie au dessus du petit plan d'eau et vient se poser, inconsciente souveraine, au milieu d'autres bien plus humbles espèces.
Bientôt on passe un pont sur une rivière brune où les bateaux vont dormir le soir; les gracieuses maisons cèdent la place à la forêt. Des plages étroites, envahies par la végétation, se courbent et entourent de paisibles petites baies. En traquant un pluvier argenté, nous découvrons une famille de renards. Pendant que papa et maman restent paisiblement couchés, les petits gambadent, fouillent, jouent; ils se couchent encore une fois près de maman pour se restorer par une vigoureuse têtée, se relèvent et jouent encore. Leurs yeux dorés et tendres s'ouvrent sur le monde.
Voici de vieux troncs morts couchés. Dans les crevasses du bois et entre les arbustes, se cachent des créatures plus anciennes que les oiseaux: ce sont les lézards verts, miniatures de dragons au corps couleur de jade et à la tête bleue. Bien que discrets, ils sont attirées par le soleil, qui réchauffe les pierres précieuses de leur corps.
De ce premier coin d'Eden nous nous déplaçons vers un lieu bien plus étrange, aux alentours de Penthaz. Le temps est devenu maussade et cette petite vallée ronde, probablement ce qui reste d'une ancienne carrière, n'aurait vraiment aucun intérêt aux yeux d'un promeneur peu averti. Mais il faut savoir que dans les trous de la falaise nichent de petites merveilles aux couleurs d'arc-en-ciel, les guêpiers. Bientôt nous les voyons virevolter d'un arbre à l'autre; ils capturent un gros insect malheureux et viennent le consommer, posés sur une branche, nous offrant ainsi le spectacle de leur plumage jaune-roux-vert-bleu. Et ce ne sont pas les seuls habitants de la vallée à se parer de couleurs féériques, car des bruants jaunes brillent dans le feuillage et un pic vert se laisse apercevoir dans la fourche d'un arbre. Pour finir, un milan royal nous survole, certainement pour nous faire admirer son style de vol, plus élégant et excentrique que celui des milans noirs.